Retraite: entre solidarité et liberté de choix
Le système de retraite français repose sur un principe fort et solidaire : la répartition. Depuis 1945, les cotisations des actifs servent à financer directement les pensions des retraités, incarnant une véritable entraide entre générations. Ce socle collectif peut être complété par une approche plus individuelle, grâce à des dispositifs de capitalisation comme le plan épargne-retraite (PER) ou l’assurance-vie, permettant à chacun de se constituer une épargne personnalisée pour ses vieux jours.
Derrière cette architecture se cache une grande complexité : trimestres validés, points accumulés, décotes, surcotes, majorations… Autant de notions techniques qui rendent la retraite difficile à anticiper sans accompagnement. Pour éviter les mauvaises surprises, il est essentiel de suivre de près son relevé de carrière, de réaliser des simulations et de s’informer sur les stratégies d’optimisation possibles.
Anticiper sa retraite, c’est s’assurer un avenir plus serein. Encore faut-il savoir par où commencer.
Décryptage de la retraite
La retraite est structurée en trois piliers :
- la retraite de base : obligatoire et par annuités pour valider des trimestres, elle couvre tous les salariés et travailleurs non-salariés
- les retraites complémentaires : obligatoires, souvent par points. Elles viennent majorer la pension de base. Il s’agit notamment de l’Agirc-Arrco pour les salariés du privé, l’Ircantec pour les non-titulaires de l’Etat ou la RAFP (retraite additionnelle de la fonction publique) pour le public, puis les caisses des professions libérales (Cipav, CNBF, Cavec, CARMF, Carpimko, etc.)
- les régimes supplémentaires (facultatifs, par capitalisation) se composent d’épargnes individuelles mises en place par le salarié (PER, assurance-vie) et d’épargnes collectives mises en place au sein des entreprises (PER entreprise, Perco, article 83, etc.)
Comment acquérir des droits ?
Les droits sont validés par le paiement des cotisations obligatoires proportionnellement aux revenus. Ces cotisations permettent de valider des trimestres.
Un trimestre est validé chaque fois que le salaire brut atteint cent cinquante Smic horaire, soit 1 782 euros pour 2025.
La validation des trimestres par la perception d’un revenu sera dite trimestres cotisés.
Il y a d’autres possibilités de valider des trimestres liés à des évènements spécifiques :
- les trimestres assimilés : en cas de période de maladie, de maternité, de chômage, entre autres, peuvent être prises en compte pour valider des trimestres.
- les trimestres bonus : naissance et éducation des enfants, enfant handicapé.
- et le rachat de trimestres ou affiliation volontaire : pour combler des manques, notamment pour les non-actifs ou les expatriés.
L’âge de départ en retraite
Depuis la réforme de 2023, l’âge légal de départ a été relevé progressivement de soixante-deux à soixante-quatre ans pour les générations nées à partir de septembre 1961.
Quel que soit l’âge, il faut justifier d’un nombre minimal de trimestres pour bénéficier du taux plein (cf. tableau page suivante).
Si le nombre de trimestres à l’âge légal n’est pas atteint, la retraite peut être prise, mais avec une décote. A l’inverse, si tous les trimestres sont validés et que la personne décide de travailler au-delà de l’âge légal, une surcote par trimestre supplémentaire travaillé au-delà de cet âge légal est appliquée.
Quelle possibilité de départ avant l’âge légal ?
Un départ anticipé est possible dans certaines situations :
- carrières longues : si cinq trimestres ont été validés avant la fin des seize, dix-huit, vingt ou vingt-et-un ans (ou quatre trimestres si la personne est née au cours du quatrième trimestre). Attention, tous les trimestres doivent avoir été validés. Par ailleurs, les trimestres assimilés sont retenus dans une certaine limite
- handicap, inaptitude, pénibilité (compte professionnel de prévention ou C2P)
- et certaines professions exposées (amiante, marins, etc.)
Les périodes à l’international seront-elles prises en compte ? Détachement ou expatriation ?
Les Français travaillant à l’étranger peuvent continuer à cotiser dans des conditions différentes selon les pays. En tant que travailleur international, il est important de comprendre comment ces systèmes fonctionnent et si des accords existent entre les pays pour coordonner les droits à la retraite.
Si la personne travaille en détachement, elle reste affiliée à la Sécurité sociale française, ses droits sont calculés comme si elle n’avait pas quitté la France.
Pour les expatriés, si l’on travaille sous contrat local, on cotise dans le pays d’accueil sans validation de trimestres en France, sauf option pour la caisse des Français à l’étranger. Il faut vérifier si un accord entre la France et le pays d’accueil existe. Si oui, cela permettra de prendre en compte les trimestres acquis à l’étranger et d’optimiser le nombre de trimestre pour bénéficier du taux plein.
Attention au non-cumul entre pays : si on travaille dans plusieurs pays au cours d’une carrière, tous ne seront pas retenus. Il ne peut pas y avoir une totalisation de toutes les périodes de tous les pays travaillés. Un seul accord sera retenu : le plus avantageux. La seule exception à ce principe est les pays d’Europe : si l’on travaille uniquement dans plusieurs pays européens exclusivement, il y aura une totalisation de toutes les périodes travaillées en Europe.
Si la personne travaille dans un pays qui n’a pas signé d’accord de Sécurité sociale avec la France, la retraite sera calculée dans chacun des pays, sans tenir compte des périodes validées dans les autres pays. Cela aura donc un impact très important sur la retraite en France.
Pour pallier cette perte, il est possible de souscrire une assurance-retraite volontaire auprès de la CFE (Caisse des Français à l’étranger) afin de cotiser au régime de retraite de base français. L’adhésion volontaire à la CFE garantit la continuité des droits en France (validation des trimestres) et l’intégration des périodes cotisées en France auprès de la CFE dans le calcul des vingt-cinq meilleures années.
Le calcul de la retraite
La retraite de base
Elle est calculée à partir de la moyenne des vingt-cinq meilleures années de revenu sur laquelle est appliqué un taux de liquidation, lequel dépend du nombre de trimestre validé. Il est appelé « taux plein » lorsqu’il atteint 50 %. Attention, le salaire annuel pris en compte pour le calcul des vingt-cinq meilleures années est plafonné au plafond annuel de la Sécurité sociale (Pass), soit 47 100 euros en 2025. Au-delà de ce plafond, l’assuré ne cotise pas à la retraite de base.
Pour un professionnel libéral, la retraite de base sera calculée en fonction d’un nombre de points acquis, au lieu des vingt-cinq meilleures années.
Pour les régimes par annuités : moyenne des vingt-cinq meilleures années × taux de liquidation (maximum 50 % secteur privé ou 75 % secteur public) × (trimestres validés / trimestres requis).
Pour les régimes par points : nombre de points × valeur de service du point, éventuellement ajusté par un taux de liquidation.
Trois mécanismes peuvent modifier ce montant :
- décote (minoration) pour départ avant conditions réunies et qui dépend du nombre de trimestres manquants. Par exemple, chaque trimestre manquant entraîne une réduction de 1,25 % selon le régime. A soixante-sept ans, on obtient le taux plein automatiquement même s’il manque encore des trimestres
- surcote (majoration) pour prolongation d’activité au-delà de l’âge légal et du nombre de trimestres requis : +1,25 % par trimestre pour le régime général
- majoration familiale : +10 % pour trois enfants ou plus, +5 % de surcote parentale (parents au foyer, aidants), et autres bonifications selon la situation personnelle
Un minimum contributif (MiCo) garantit un plancher de pension pour les assurés ayant liquidé leur retraite à taux plein. Ce plancher varie de 747,69 euros à 893,66 euros en 2025 selon que la personne a cotisé plus ou moins de cent-vingt trimestres.
La retraite complémentaire
Chaque année, des cotisations génèrent des points pour la retraite complémentaire (Agirc-Arrco, RCI, Cipav, CNBF, Cavec, Ircantec, etc.). Ces points seront valorisés au moment du départ en retraite.
Si l’assuré n’a pas le taux plein, la retraite complémentaire subit également une décote.
Calcul retraite complémentaire : nombre de points × valeur du point (éventuellement ajusté par un taux de liquidation).
Comment optimiser la future retraite ?
Plusieurs leviers permettent d’améliorer le montant de la pension : prolonger l’activité pour bénéficier de surcote, racheter des trimestres manquants, cumuler emploi-retraite ou retraite progressive pour adoucir la transition ou encore constituer une épargne via PER individuel, PER collectif, assurance-vie, immobilier, par exemple.
Le rachat de trimestres : combler les lacunes de carrière
L’opportunité de racheter des trimestres et d’augmenter ainsi le montant de sa future retraite est différente pour chaque personne. Avant de se décider à racheter des trimestres, il faut procéder à des études préalables pour délimiter ses besoins et étudier le rapport supplément de retraite/prix du rachat.
Il est possible de racheter douze trimestres maximum pour :
- des années incomplètes (moins de quatre trimestres), et les années d’études supérieures (jusqu’à quarante ans, quatre trimestres au tarif réduit), périodes de stages (à tarif préférentiel), périodes apprentissage (à tarif préférentiel)
- des périodes artisanales/commerciales. Attention, il existe un délai de six années pour effectuer ce rachat
- des périodes à l’étranger, sous réserve de cinq années d’affiliation antérieures et d’une demande dans les dix ans suivant la fin d’activité
Le coût du rachat dépend de l’âge, des revenus des trois dernières années et de l’option de rachat retenue :
- option 1 : rachat des trimestres qui viendront améliorer le taux de liquidation
- option 2 : rachat permettant d’améliorer le taux de liquidation (option 1) + la durée d’assurance qui améliore le dernier ratio
Moins coûteuse, l’option une est la plus souvent privilégiée et a l’avantage d’être déductible des revenus l’année du paiement (cf. tableau ci-dessous).
Cumul emploi-retraite : travailler tout en percevant sa pension
Tout retraité ayant liquidé l’ensemble de ses pensions et atteint l’âge d’ouverture des droits à la retraite peut reprendre une activité professionnelle :
- cumul intégral, sans plafond, si le retraité remplit les conditions de taux plein et d’âge légal
- cumul plafonné, si les conditions ne sont pas remplies. Dans cette situation il y aura un revenu annuel limité
Nouveauté avec la réforme des retraites : en cas de cumul emploi retraite dans le cadre d’un cumul emploi retraite intégral (c’est-à-dire avoir le taux plein et l’âge légal au minimum), il est possible de valider des nouveaux droits à la retraite. Attention un délai de carence de six mois est à respecter si l’on reste chez le même employeur pour en bénéficier.
Retraite progressive : un passage à la retraite en douceur
Ce dispositif d’aménagement de fin de carrière permet de percevoir une partie de sa pension de retraite, tout en continuant à exercer une activité professionnelle à temps partiel et à cotiser pour obtenir de nouveaux droits à retraite.
Pour en bénéficier, il convient d’être âgé d’au moins soixante-deux ans (soixante ans avant le 1er septembre 2025) et d’avoir validé au moins cent-cinquante trimestres.
En fonction de la profession exercée, il convient de remplir d’autres conditions :
- salarié : exercer exclusivement une ou plusieurs activités salariées à temps partiel, dont la durée est comprise entre 40 % et 80 % de la durée du travail applicable à son entreprise. Pas de refus motivé de l’employeur
- professionnel indépendant : exercer exclusivement une activité artisanale, industrielle, commerciale ou libérale. Percevoir des revenus professionnels réduits d’au moins 20 %, et d’au plus 60 % par rapport à la moyenne des revenus actualisés
Selon que l’on est salarié ou professionnel indépendant, la retraite dépendra de la quotité de travail pour les salariés et de la baisse des revenus professionnels pour les indépendants.
Exemple de la retraite progressive d’un salarié
Jean, salarié, a 62 ans et a validé 160 trimestres. Le montant de son salaire annuel moyen s’élève à 40 000 €. Il souhaite bénéficier de la retraite progressive et, pour ce faire, envisage de travailler 20 heures par semaine.
La durée du travail hebdomadaire applicable à son entreprise est de 35 heures.
Rappel de la formule : retraite entière x [100 % - (quotité de travail à temps partiel / durée légale applicable dans l’entreprise)].
La quotité de travail à temps partiel s’élève ainsi à 20/35 x 100 = 57 %.
Par conséquent, la fraction de pension de retraite qui lui sera versée représentera : 100 % - 57 % = 43 % du montant entier de sa retraite.
Le PER : un outil efficace pour compléter sa retraite
Le PER individuel est un produit d’épargne à long terme, conçu pour préparer sa retraite tout en bénéficiant d’un cadre fiscal attractif. Ouvert à tous, salariés, indépendants, demandeurs d’emploi, il permet de se constituer progressivement un capital ou une rente, disponible à partir de l’âge légal de départ à la retraite.
Fonctionnement simple et souple
Les sommes versées sur un PER sont bloquées jusqu’à la retraite, sauf cas exceptionnels (achat de la résidence principale, invalidité, etc.).
Par défaut, l’épargne est gérée selon une stratégie « pilotée » : les fonds sont d’abord investis sur des actifs dynamiques pour viser la performance, puis sécurisés à l’approche de la retraite.
Il est aussi possible d’opter pour une gestion libre.
Un levier fiscal attractif
Le PER offre un avantage fiscal majeur : les versements sont déductibles du revenu imposable dans la limite d’un plafond annuel. Cela permet de réduire son impôt tout en se constituant une épargne retraite.
A noter : il est possible de renoncer à cette déduction à l’entrée pour alléger la fiscalité à la sortie. Cette option est définitive et doit être exercée lors du versement.
Les plafonds de déduction sont mutualisables entre partenaires de Pacs ou conjoints, et peuvent être reportés pendant trois ans en cas de non-utilisation.
En somme, le PER individuel combine souplesse, avantage fiscal et performance potentielle. C’est un très bon outil pour bâtir sereinement une partie de sa retraite.
Principe : déblocage à l’âge de la retraite
A l’âge de la retraite, il est possible de demander le versement de l’épargne accumulée : en capital, en rente ou un mixte des deux.
Exceptions : déblocages avant l’âge de la retraite
Possibilité de récupérer l’épargne en capital en cas :
- d’acquisition de la résidence principale
- d’invalidité (vous, vos enfants, votre conjoint ou partenaire de Pacs)
- de décès de votre conjoint ou partenaire de Pacs
- d’expiration de vos droits aux allocations chômage
- de surendettement
- de cessation d’activité non salariée à la suite d’un jugement de liquidation judiciaire.
Tracer sa route vers une retraite à bon port
A l’heure où les trajectoires professionnelles prennent des allures de navigation en haute mer, traversant parfois des tempêtes, la retraite n’est plus un simple point d’arrivée, mais une véritable traversée stratégique, à ajuster en fonction de son cap et de ses objectifs.
Il s’agit de manœuvrer habilement entre le système de retraite par répartition et les solutions de capitalisation, tout en s’appuyant sur des outils indispensables, comme le rachat de trimestres, le cumul emploi-retraite, la retraite progressive, la validation de périodes à l’étranger pour les expatriés, mais aussi le PER, l’assurance vie, l’immobilier… Autant de balises à placer pour sécuriser son itinéraire !
Comme tout bon navigateur, l’anticipation doit être le meilleur gouvernail. Dès quarante-cinq ans, il est essentiel de vérifier le relevé de carrière, de corriger les éventuelles erreurs, de simuler les droits à la retraite et d’affiner les objectifs pour pouvoir, un jour, jeter l’ancre là où l’on souhaite vraiment accoster. Pour cela, l’accompagnement d’un professionnel peut s’avérer déterminant.
Ce n’est pas le vent qui doit décider de la destination, c’est l’orientation donnée aux voiles… Alors bon vent !
Selon l’enquête Fidelity - European Investor Sentiment Survey, près de 50 % des investisseurs français renforcent déjà eux-mêmes leur épargne-retraite ; 447 % des épargnants interrogés effectuent des versements supplémentaires en prévision de leur retraite, et 52 % gèrent de manière active leur épargne-retraite ; épargner davantage pour la retraite figure parmi les principaux objectifs des investisseurs français ; toutefois, 55 % des investisseurs estiment ne pas épargner suffisamment pour leur retraite. L’étude European Investor Sentiment Survey de Fidelity International souligne que les démarches entreprises par les investisseurs français vont dans le sens d’une meilleure anticipation de leur retraite. Sur les 1000 épargnants interrogés en France, près de la moitié (47 %) déclarent épargner de manière spécifique pour leur retraite, et 52 % prennent également des décisions quant à l’allocation de leur épargne retraite. Si la constitution d’une épargne de précaution demeure la priorité, l’importance accordée à la fois au maintien du niveau de vie et au renforcement de l’épargne retraite s’explique par les inquiétudes des investisseurs : plus de la moitié d’entre eux (55 %) anticipent une dégradation de leur niveau de vie une fois à la retraite et estiment que leurs réserves actuelles sont insuffisantes. Les cinq principaux objectifs financiers d’investissement Constituer un fonds d’urgence : 43% Épargner davantage pour la retraite : 33% Maintenir mon niveau de vie actuel : 33% Prévoir les besoins de santé liés à l’âge (ex. : soins de longue durée, santé, etc.) : 30% Constituer/laisser un héritage : 27% Si l’inflation apparaît comme le principal obstacle à la réalisation des objectifs de retraite des investisseurs français, les imprévus financiers figurent également parmi leurs préoccupations majeures, tout comme l’incertitude économique, perçue comme une menace pour la stabilité et leur sécurité financière à long terme. Les cinq principaux obstacles à l’atteinte des objectifs de retraite Inflation : la hausse du coût de la vie réduit le pouvoir d’achat de mon épargne: 37% Dépenses imprévues : urgences financières ou grosses dépenses non planifiées : 30% Incertitude économique : instabilité générale affectant ma sécurité financière: 30% Épargne insuffisante : incapacité à mettre de côté assez pour atteindre mes objectifs retraite: 23% Obligations familiales : besoin de soutenir des proches qui pèse sur l’épargne retraite: 18% Dans l’ensemble, près d’un investisseur français sur cinq (22 %) craint que son épargne retraite ne s’épuise trop rapidement. Cette appréhension constitue leur deuxième préoccupation la plus citée après les problèmes de santé. Les cinq principales inquiétudes liées à la retraite Problèmes de santé : 45% L’épargne retraite s’épuisera trop tôt: 22% Retraite reportée en raison d’un changement politique : 21% Être à la charge de mes proches: 19% Survenue d’un événement imprévu (perte d’un proche, perte soudaine d’actifs, changements de vie, etc.): 19%
Avant le dénouement du contrat, l’acceptation du bénéficiaire n’est pas exigée pour la validité du contrat. Il n’est d’ailleurs pas nécessaire que le bénéficiaire soit informé de l’existence de ce contrat établi à son profit. Il appartient aux conseils (notaires, conseillers en gestion de patrimoine, etc.) de mettre dans ce domaine leur imagination féconde au service de leur clientèle. L’acceptation du bénéficiaire nécessite l’accord du souscripteur et prend la forme (C. ass. art. L. 132-9, II, dans sa rédaction applicable depuis le 18 décembre 2007) soit d’un avenant au contrat, signé de l’entreprise d’assurance, du souscripteur et du bénéficiaire ; soit d’un acte authentique ou sous seing privé signé du souscripteur et du bénéficiaire, et qui n’a d’effet à l’égard de l’assureur que lorsqu’il lui est notifié par écrit. Lorsque la désignation du bénéficiaire est faite à titre gratuit, la loi interdit toute acceptation précipitée en offrant au souscripteur ce qui s’apparente à un délai de réflexion : l’acceptation du bénéficiaire ne peut intervenir que trente jours après que le souscripteur a été informé de la conclusion du contrat. Avant le 18 décembre 2007, l’acceptation du bénéficiaire n’était soumise à aucune condition particulière et pouvait intervenir à l’insu du souscripteur. Le cas des majeurs protégés Pour les majeurs sous tutelle et sous curatelle, l’acceptation de la clause bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie sans charge constitue, sauf circonstances particulières, un acte d’administration (décret 2008-1484 du 22 décembre 2008, annexe 2 : JO 31 texte n° 94). Il en résulte que le majeur sous curatelle peut accepter le contrat souscrit à son profit sans l’assistance de son curateur, et que le tuteur n’a pas besoin de l’autorisation du juge des contentieux de la protection exerçant les fonctions de juge des tutelles (ou du conseil de famille) pour accepter le contrat souscrit au profit du majeur sous tutelle. Si, à l’inverse, le contrat a été souscrit par le majeur protégé, le consentement donné à l’acceptation du bénéficiaire constitue à notre avis un acte de disposition pour lequel le majeur sous curatelle doit être assisté de son curateur, et le tuteur autorisé par le juge. Si le majeur a souscrit un contrat d’assurance-vie au cours des deux années précédant la publicité du jugement d’ouverture de la tutelle ou de la curatelle, l’acceptation du bénéficiaire peut être annulée si l’incapacité du majeur était notoire ou connue du cocontractant à l’époque de la conclusion du contrat (C. ass. art. L. 132-4-1, al. 4). Bien que la loi utilise le terme de « cocontractant », on doit à notre avis l’interpréter comme visant la connaissance par le bénéficiaire acceptant – et non par la compagnie d’assurance – de l’altération des facultés du majeur. Effets de l’acceptation Irrévocabilité de la désignation du bénéficiaire L’acceptation a pour effet de bloquer le contrat au profit du bénéficiaire : « La stipulation en vertu de laquelle le bénéfice de l’assurance est attribué à un bénéficiaire déterminé devient irrévocable par l’acceptation de celui-ci » (C. ass. art. L. 132-9, I). Concrètement, le bénéficiaire est certain de le demeurer si le contrat se dénoue par le décès de l’assuré, sauf s’il accepte de laisser le souscripteur modifier la clause. L’acceptation dont il est question est celle du bénéficiaire de premier rang. L’acceptation du bénéficiaire de second rang n’empêche pas le souscripteur de modifier le bénéficiaire de premier rang (Cass. 2e civ. du 2 juin 2005, n° 04-13.306 FS-PB : BPAT 5/05 inf. 155). Exceptions à l’irrévocabilité de la désignation du bénéficiaire La doctrine considère que la principale exception concerne la désignation du conjoint comme bénéficiaire. Cette désignation ne produisant pas d’effet pendant le mariage (les sommes n’étant dues qu’au décès du souscripteur, sous réserve de la survie du bénéficiaire), elle reste librement révocable (C. civ. art. 1096, al. 2 a contrario). Le souscripteur pourrait ainsi, à tout moment, substituer à son conjoint la personne de son choix. Le fait que les bénéficiaires de second rang aient, eux aussi, accepté le contrat n’empêche pas le souscripteur de revenir sur la désignation de son conjoint (Cass. 2e civ. du 2 juin 2005, n° 04-13.306 FS-PB : BPAT 5/05 inf. 155). En considérant que l’acceptation du contrat d’assurance-vie (quel que soit le bénéficiaire) obéisse au même régime que la donation, la révocation serait également possible dans les cas suivants : - en cas d’ingratitude du bénéficiaire, notamment en cas de tentative d’homicide du souscripteur (ou de l’assuré) par le bénéficiaire ; - en cas d’inexécution des charges qui auraient pu être prévues en contrepartie du consentement du souscripteur à l’acceptation ; - en cas de survenance d’enfants (sauf lorsque le bénéficiaire est le conjoint), si cette révocation a été prévue dans le document constitutif, en l’occurrence l’avenant ou l’acte constatant l’acceptation (règle applicable aux contrats acceptés depuis le 1er janvier 2007). Cession du bénéfice du contrat par le bénéficiaire Après avoir accepté la stipulation faite à son profit, le bénéficiaire peut céder le bénéfice du contrat si cette possibilité a été expressément prévue ou s’il obtient le consentement du souscripteur et de l’assuré (C. ass. art. L. 132-15). En pratique, il est extrêmement rare que la cessibilité par le bénéficiaire acceptant du bénéfice du contrat soit prévue, ce qui se comprend aisément puisque cette faculté permettrait au bénéficiaire initialement désigné d’imposer au souscripteur un nouveau bénéficiaire qu’il n’a pas choisi. Opérations sur le contrat Acceptation intervenue depuis le 18 décembre 2007 Jusqu’au terme du contrat, le souscripteur a besoin de l’accord du bénéficiaire pour certaines opérations qui pourraient porter atteinte à la substance même du contrat. L’acceptation du bénéficiaire réalisée avec l’accord du souscripteur interdit à ce dernier d’effectuer des rachats ou d’obtenir une avance sans l’accord du bénéficiaire (C. ass. art. L. 132-9, I-al. 1 in fine). De la même façon, le nantissement du contrat accepté n’est pas possible sans l’accord du bénéficiaire (C. ass. art. L. 132-10, al. 2). Les autres modifications contractuelles, dans la mesure où elles n’ont pas pour effet de clôturer le contrat, de diminuer l’épargne acquise au jour de l’acceptation ou de réduire les droits antérieurs du bénéficiaire, sont de la compétence exclusive du souscripteur. Le souscripteur d’un contrat en unités de compte peut, par exemple, librement décider d’un changement de profil de gestion (passage d’un profil prudent à un profil dynamique, par exemple), en dépit du fait que ce changement peut avoir des répercussions importantes à la hausse comme à la baisse sur la valeur de rachat du contrat. L’acceptation d’un contrat déjà donné en nantissement est sans effet pour le créancier nanti ; sauf clause contraire de l’acte de nantissement, le créancier peut provoquer le rachat en dépit de l’acceptation (C. ass. art. L. 132-10, al. 3 et 4). Acceptation intervenue avant le 18 décembre 2007 Dans le silence de la loi, la Cour de cassation a décidé que le souscripteur conserve la possibilité d’effectuer un rachat après l’acceptation du bénéficiaire, sauf s’il a expressément renoncé à son droit (Cass. chambre mixte du 22 février 2008, n° 06-11.934 PBRI : BPAT 2/08 inf. 63 ; dans le même sens, Cass. 2e civ. du 19 février 2009, n° 08-11.917 F-D). La solution est, à notre avis, la même pour les avances. Pour qu’il y ait renonciation expresse du souscripteur à son droit de rachat, il faut qu’un acte distinct manifeste de façon indiscutable sa volonté de subordonner son droit de rachat au bon vouloir du bénéficiaire. La clause, très fréquente dans les conditions générales des contrats, qui subordonne le droit de rachat du souscripteur à l’accord du bénéficiaire acceptant, ne peut pas valoir >>> renonciation expresse (Cass. 2e civ. du 4 novembre 2010, n° 09-70.606 F-D : BPAT 1/11 inf. 49 ; Cass. 2e civ. du 3 novembre 2011, n° 10-25.364 F-D : BPAT 1/12 inf. 33). Les juges ne peuvent pas requalifier le contrat en donation indirecte au motif que le souscripteur qui a consenti à l’acceptation du bénéficiaire (intervenue avant le 18 décembre 2007) se serait dépouillé irrévocablement, dès lors qu’il n’a pas renoncé expressément à l’exercice de son droit de rachat (Cass. 1re civ. du 20 novembre 2019, n° 16-15.867 FS-PBI : BPAT 1/20 inf. 26). Intérêt de l’acceptation « acceptée » du bénéficiaire Nous voyons ici quelques illustrations, sachant que des applications multiples peuvent être trouvées pour répondre à des situations fort diverses ; il appartient aux conseils (notaires, conseillers en gestion de patrimoine, etc.) de mettre dans ce domaine leur imagination féconde au service de leur clientèle. Nantissement du contrat L’acceptation du bénéficiaire peut être mise en place pour conférer une garantie : c’est la situation classique de la désignation de la banque comme bénéficiaire acceptant au titre de la garantie accordée en contrepartie d’un crédit qu’elle consent, à hauteur tout au moins du capital correspondant à la garantie demandée, le souscripteur du contrat pouvant, le cas échéant, procéder aux rachats partiels du contrat pour la fraction excédentaire. Si le contrat comporte déjà un bénéficiaire acceptant, son accord sera nécessaire pour lui substituer un nouveau bénéficiaire. Fiscalement, financièrement et économiquement, il peut être préférable d’indiquer comme bénéficiaires des personnes choisies par le souscripteur assuré, à charge pour elles de rembourser le solde de l’emprunt (selon des modalités à préciser). Afin de garantir la banque, les fonds seront bloqués dans un compte séquestre (gage-espèce) chez un notaire, à charge pour ce dernier de libérer les fonds au profit de la banque au moindre incident de paiement, et au profit des bénéficiaires désignés pour la fraction excédant le solde de l’emprunt à rembourser, majoré du solde des intérêts de l’emprunt, par exemple. Protection du souscripteur L’acceptation du bénéficiaire peut présenter un intérêt pour le souscripteur lui-même qui, craignant de voir ses facultés décliner et de se trouver soumis à certaines « amicales pressions », souhaite « verrouiller » la désignation du bénéficiaire. Transmission familiale La souscription d’un contrat d’assurance-vie au bénéfice d’un héritier défavorisé peut être réalisée (dans les limites de l’article L. 132-13 du Code des assurances) dans le cadre d’une opération globale afin d’équilibrer les différents lots. Afin d’assurer la pérennité de l’équilibre, le transfert du capital assuré n’intervenant qu’au dénouement du contrat, l’acceptation de la clause bénéficiaire pourra être une utile précaution. L’acceptation de la clause bénéficiaire peut également être envisagée dans la gestion d’une donation du contrat par des grands-parents à leurs petits-enfants, par exemple. Certains auteurs suggèrent le schéma décrit ci-après, dont l’efficacité est cependant subordonnée à la validité de la transmission de la qualité de souscripteur. La démarche consiste pour les grands-parents à souscrire chacun un contrat sur la tête de leurs petits-enfants en se constituant bénéficiaires réciproques en cas de décès (si les petits-enfants ont moins de douze ans, l’article L. 132-3 du Code des assurances interdit la conclusion d’une assurance-décès sur leur tête, mais la conclusion d’un contrat en cas de vie assorti d’une assurance en cas de décès semble être admise par les compagnies d’assurance). Puis les grands-parents acceptent mutuellement le bénéfice des contrats et enfin procèdent à la donation de ceux-ci aux petits-enfants. Les petits-enfants sont ainsi propriétaires de contrats dont ils sont souscripteurs et assurés et dont la clause bénéficiaire est acceptée, ce qui assure un contrôle de l’utilisation des sommes figurant au contrat jusqu’au décès des grands-parents, même lorsque les enfants seront majeurs. Si les grands-parents veulent renforcer la durée du contrôle, il leur suffit dans la désignation des bénéficiaires de prévoir que les parents seront bénéficiaires successifs (en leur faisant accepter cette désignation), de manière qu’en cas de décès prématuré des grands-parents, les parents puissent prendre le relais. Pour accroître encore la sécurité de l’opération, les grands-parents pourront insérer dans la donation aux petits-enfants une clause d’interdiction d’aliéner (voir aussi F. Lucet et D. Coron, La donation consentie par les parents en vue de la souscription d’un contrat d’assurance-vie : ingénierie patrimoniale, novembre-décembre 1998 p. 2, ainsi que le 96e Congrès des notaires de France : Le patrimoine au XXIe siècle, p. 584). Afin d’éviter tout risque de contestation quant à la possibilité pour le donateur de transmettre la qualité de souscripteur du contrat, la solution alternative de la donation d’une somme d’argent à charge de souscrire un contrat d’assurance-vie dont le donateur sera bénéficiaire acceptant peut être préférée. L’acceptation du contrat d’assurance-vie peut également être envisagée pour assurer financièrement la compensation d’une renonciation anticipée à l’action en réduction. Cas pratique Jean est chef d’entreprise et a deux enfants, Sylvie et Arthur. Son patrimoine se compose d’une entreprise d’une valeur de 400 et de contrats d’assurance-vie pour 400. Il souhaite transmettre l’entreprise à sa fille et les liquidités à son fils. Le capital versé par la compagnie d’assurance étant hors succession, cette somme ne sera pas prise en compte pour le calcul des droits réservataires des héritiers. Dès lors, l’attribution du capital-décès au profit d’Arthur ne l’empêcherait pas de contester l’attribution au profit de Sylvie de l’entreprise. Une solution peut consister pour Jean à obtenir d’Arthur la signature d’un acte de renonciation anticipée à l’action en réduction. Cela permettra à Jean de rédiger un testament léguant l’entreprise à Sylvie sans risque qu’après son décès, Arthur puisse contester cette attribution. A titre de compensation, la volonté de Jean étant d’assurer l’égalité entre ses enfants, Arthur sera désigné bénéficiaire du contrat d’assurance-vie. L’acceptation du bénéfice du contrat permettra à Arthur d’empêcher toute modification ultérieure de la désignation bénéficiaire, lui-même ayant perdu dès la signature de l’acte de renonciation tout droit de contester l’attribution à Sylvie de l’entreprise. Afin de sécuriser également les droits de Sylvie sur la succession, car l’attribution de l’entreprise à son profit ne sera définitive que si son père rédige en sa faveur un testament (à défaut de la transmettre de manière anticipée), il pourrait être envisagé que le bénéfice du contrat au profit d’Arthur soit subordonné à la transmission effective de l’entreprise à sa sœur.
Dans un contexte où les avantages fiscaux liés à l’investissement immobilier sont progressivement restreints, le dispositif du déficit foncier demeure l’un des derniers mécanismes permettant de réduire efficacement son impôt tout en valorisant un patrimoine immobilier. Il repose sur une logique simple : lorsqu’un propriétaire bailleur engage des travaux de rénovation ou d’entretien supérieurs à ses revenus fonciers, le déficit généré peut venir diminuer son revenu global, dans certaines limites, et ainsi réduire son impôt sur le revenu. Ce dispositif, bien que souvent méconnu du grand public au profit d’avantages plus médiatisés comme le Pinel ou le LMNP, présente une souplesse d’utilisation, une absence de plafonnement global des niches fiscales, et un intérêt patrimonial durable, notamment dans une stratégie de rénovation ou de revalorisation du bâti ancien. Le mécanisme du déficit foncier est prévu par l’article 156, I-3° du Code général des impôts (CGI). Cet article autorise l’imputation du déficit foncier sur le revenu global dans la limite de 10 700 € par an (21 400 € jusqu'au 31/12/2025), à condition que le contribuable conserve la location du bien pendant au moins trois ans après l’année de l’imputation du déficit. Conditions d’éligibilité Pour bénéficier du dispositif, plusieurs conditions doivent être respectées : • Le bien doit être loué nu (location non meublée) à usage d’habitation principale du locataire. • Le régime fiscal applicable doit être le régime réel d’imposition (et non le micro-foncier). • Les dépenses doivent concerner des travaux déductibles (entretien, réparation, amélioration) et non de la construction ou reconstruction. • Le propriétaire doit conserver le bien en location pendant trois ans à compter de l’année d’imputation du déficit. Mécanisme comptable et fiscal du déficit foncier Calcul du résultat foncier Les revenus fonciers imposables correspondent à la différence entre : • Les revenus locatifs perçus, et • Les charges déductibles (travaux, intérêts d’emprunt, taxe foncière, primes d’assurance, frais de gestion, etc.). Lorsque les charges déductibles excèdent les revenus locatifs, il en résulte un déficit foncier. Imputation du déficit Le déficit foncier se décompose en deux parties : 1. La part du déficit provenant des charges hors intérêts d’emprunt (travaux, frais de gestion, taxes…) → Imputable sur le revenu global du contribuable dans la limite de 10 700 € par an (ou 21 400 € en cas de location à un dispositif spécifique comme le Périssol). 2. La part du déficit liée aux intérêts d’emprunt → Imputable uniquement sur les revenus fonciers des dix années suivantes. Exemple : Revenus locatifs = 12 000 € Travaux et autres charges = 30 000 € → Déficit total = 18 000 € → Imputation : 10 700 € sur le revenu global, 7 300 € reportés sur les revenus fonciers futurs. Intérêt fiscal du dispositif Réduction immédiate de l’impôt sur le revenu L’imputation sur le revenu global permet une économie d’impôt directe. Ainsi, un contribuable au Taux Marginal d’Imposition (TMI) de 30 % bénéficiant de 10 700 € de déficit imputé sur son revenu global économisera : 10 700 € × 30 % = 3 210 € d’économie d’impôt (hors impact sur les prélèvements sociaux). Cette réduction est hors plafonnement global des niches fiscales (article 200-0 A du CGI), ce qui renforce son efficacité, notamment pour les contribuables déjà saturés en réductions d’impôt Pinel, Malraux, etc. Neutralisation temporaire des revenus fonciers futurs La fraction du déficit non imputable sur le revenu global vient réduire les revenus fonciers futurs pendant 10 ans. C’est un moyen d’effacer la fiscalité foncière (IR + prélèvements sociaux de 17,2 %) pendant plusieurs exercices. Impact cumulé sur la fiscalité du patrimoine Le dispositif permet de cumuler des avantages : • Une diminution du revenu imposable, • Une valorisation du patrimoine immobilier (grâce aux travaux), • Et une optimisation de la trésorerie via une fiscalité allégée pendant plusieurs années. Intérêt patrimonial du déficit foncier Valorisation du bien immobilier Le déficit foncier repose sur des travaux de rénovation : entretien, amélioration ou mise aux normes. Ces opérations permettent de : • Revaloriser le bien, • Augmenter le loyer potentiel, • Réduire les risques de vacance locative, • Et protéger le patrimoine contre l’obsolescence énergétique ou technique. Ainsi, au-delà de l’avantage fiscal, le dispositif agit comme un outil de requalification du patrimoine existant. Cas pratique et stratégie d’optimisation Situation : • Revenus fonciers annuels : 12 000 € • Travaux de rénovation : 40 000 € • Autres charges déductibles : 3 000 € • Intérêts d’emprunt : 5 000 € → Charges totales : 48 000 € Calcul du déficit : 12 000 € – 48 000 € = –36 000 € → Dont 5 000 € liés aux intérêts d’emprunt, imputables sur les revenus fonciers futurs. → Reste 31 000 €, dont 10 700 € imputables sur le revenu global, et 20 300 € reportables sur les revenus fonciers futurs. Gain fiscal immédiat : 10 700 € × 30 % = 3 210 € d’économie d’impôt (hors PS). Les 20 300 € restants viendront neutraliser les revenus fonciers des années suivantes. Stratégie de "création" de déficit foncier via un programme ancien à rénover De nombreux investisseurs utilisent le déficit foncier dans le cadre de programmes immobiliers anciens à rénover, souvent proposés par des opérateurs spécialisés. Ces montages consistent à : • Acheter un immeuble ancien avec travaux, • Distinguer dans le prix d’acquisition la part du foncier et la part des travaux (ces derniers seuls étant déductibles), • Réaliser les travaux avant mise en location, • Et bénéficier d’un fort déficit la première année, permettant une optimisation fiscale immédiate. Ce type d’investissement est souvent présenté comme une alternative au Pinel, sans contrainte de plafonds de loyers ni de durée de location rigide. Référence : BOFiP-RFPI-BASE-20-30 du 10/06/2020 – "Déficits fonciers : champ et modalités d’imputation". Contraintes et limites du dispositif Nature des travaux déductibles Seuls les travaux d’entretien, de réparation et d’amélioration sont déductibles. Sont exclus : • Les travaux de construction ou reconstruction (ex : surélévation, transformation d’un local en logement), • Les travaux qui augmentent la surface habitable, • Les dépenses de gros œuvre structurel assimilables à une reconstruction. La distinction peut parfois être subtile et source de requalification par l’administration fiscale, d’où l’importance d’une documentation technique et comptable rigoureuse (factures, devis, descriptif précis). Obligation de location Le contribuable doit conserver la location du bien pendant trois ans à compter de l’année d’imputation du déficit sur le revenu global. En cas de vente prématurée ou d’arrêt de la location, l’administration peut reprendre le bénéfice de l’imputation (article 156 du CGI). Délais et plafonds d’imputation • Imputation sur le revenu global : limitée à 10 700 € par an. • Report sur revenus fonciers : possible sur 10 ans. • En cas de déficit trop important, l’amortissement du gain fiscal s’étale donc sur plusieurs exercices. Conclusion Le déficit foncier constitue un outil fiscal et patrimonial puissant, conciliant optimisation fiscale et valorisation immobilière. Son intérêt réside dans : • Sa simplicité juridique, • Sa souplesse d’application, • Son absence de plafonnement global, • Et son alignement avec les enjeux de rénovation énergétique. Il permet aux investisseurs de réduire significativement leur impôt tout en préservant et modernisant leur patrimoine. Bien utilisé, il représente un levier incontournable pour les contribuables souhaitant conjuguer fiscalité maîtrisée et création de valeur durable. Principales références juridiques et doctrinales • Code général des impôts – Article 156, I-3° • BOFiP-RFPI-BASE-20-30, 10 juin 2020 • BOFiP-RFPI-BASE-20-10-10, 1er septembre 2012 • Loi n°2021-1104 du 22 août 2021, dite "Climat et Résilience" • BOI-RFPI-BASE-30-20-10-20 : Charges déductibles du revenu foncier
Pour placer son excédent récurrent de trésorerie, une société peut acheter des parts de SCPI démembrées : la société n’achète que l’usufruit des parts de SCPI sur une durée définie avec une décote importante (environ 20 % de la valeur en pleine propriété pour une durée de 5 ans par exemple). Mais, la société récupère 100 % des revenus de la SCPI comme si elle était pleine propriétaire des parts. Cette technique d’optimisation permet ainsi d’obtenir des rendements bien supérieurs aux placements traditionnels. Les avantages de ce placement de trésorerie Un prix d’achat des parts « minoré » : l’achat des parts de ces SCPI va se faire à un prix inférieur à celui de l’achat de parts en pleine propriété. On parle de décote. Cette décote est décroissante avec la durée de l’usufruit et avec le rendement de la part. En général, sur 5 ans, l’entreprise va acheter l’usufruit pour 20 % de la valeur de la SCPI en pleine propriété. L’achat de parts de SCPI en usufruit est également avantageux sur le plan fiscal car il est amortissable. En effet, pour être amortissable, l’achat de parts de SCPI en usufruit doit remplir les trois conditions posées par l’administration fiscale à savoir : • Une durée de vie limitée • Une perception de revenus de façon régulière • Une cession possible à tout moment La possibilité d’amortir l’usufruit va ainsi permettre à l’entreprise de réduire l’imposition sur les revenus servis par les parts. Un rendement attrayant Compte tenu des revenus généralement servis par les SCPI (jusqu’à 11 % net en 2024), de la valeur d’acquisition l e TRI final est bien supérieur aux placements de trésoreries traditionnels. Les inconvénients pour l’entreprise Les droits aux revenus tirés de l’achat de parts de SCPI sont temporaires. À la fin de la durée de l’usufruit telle que définie dans le contrat lors de la souscription des parts, l’entreprise perd tous ses droits sur les parts. Le rendement de ce type de placement n’est pas garanti : l’entreprise ayant placé sa trésorerie doit être consciente que les revenus des parts de SCPI dépendent de la qualité de gestion de la SCPI. Le choix de la (ou des) SCPI sur laquelle (lesquelles) réaliser cet investissement est donc très important. Exemple de placement de trésorerie Une Société investit une partie de sa trésorerie stable en achetant l’usufruit de parts de SCPI X : • Montant : 100.000 euros • Durée du démembrement : 3 ans • Valeur de l’usufruit : 13,50 % de la pleine propriété • Rendement SCPI : 6,20 % en 2024 • Taux d’imposition de la société : 25 % La société va donc investir 100.000€ en usufruit de SCPI équivalent à 740 740 € en pleine propriété (13,50%). Elle va donc percevoir un revenu annuel de : 6,20 % x 740 740 € = 45 925 € / an pendant 3 années Parallèlement, la Société va pouvoir amortir annuellement l’investissement soit : 100 000 € / 3 ans = 33 333 € / an pendant 3 années L’imposition annuelle Revenu annuel 45 925 € - Amortissement annuel -33 333 € = Résultat imposable 12 592 € soit une i mposition annuelle (25%) de 3 148 € Bilan au terme de l’opération Revenus bruts 137 775 € (3 x 45 925 €) - Imposition 9 444 € (3 x 3 148 €) - Investissement initial 100.000€ GAIN TOTAL OPÉRATION 28 331 € Soit un rendement de 9,43 % / an Le mécanisme de SCPI en usufruit pour un placement de trésorerie d’entreprise s’avère extrêmement efficace pour une personne morale ou une association qui souhaite placer sa trésorerie stable.
France Invest et EY ont publié la 31e édition de l’étude sur la performance nette à fin 2024 des acteurs français du capital-investissement (1 262 fonds pris en compte, sur tous les segments du Private Equity : venture & growth, capital-développement, capital-transmission, véhicules mixtes, infrastructure). En voici les principaux : - le TRI s’élève à 11,3 % nets par an depuis l’origine et à 12,4 % sur un horizon de dix ans - les rendements reculent par rapport à fin 2023 - la surperformance par rapport aux autres classes d’actifs demeure à long terme : sur les dix dernières années, le TRI du capital-investissement est supérieur aux rendements des marchés cotés (12,7 % nets par an sur dix ans contre 8,9 % pour le CAC 401, 8,3 % pour la CAC All Tradable ou encore 4,1 % pour l’immobilier) - les fonds créés depuis 2008 et ayant été entièrement liquidés ont réalisé un TRI de 14,1 % et un multiple de 1,78x pour leurs investisseurs - par segment, les performances à dix ans s’élèvent à 8,6 % pour le venture & growth ; 10,2 % pour le capital-développement ; 14,5 % pour le capital-transmission ; 10,2 % pour les véhicules mixes ; et 12,2 % pour l’infrastructure
Solution d’épargne encore méconnue des épargnants, le contrat de capitalisation est un outil efficace pour servir une stratégie patrimoniale. Il peut se définir comme une convention par laquelle l’assureur s’engage, en contrepartie de versements du souscripteur, à capitaliser les sommes sur des supports qu’il a sélectionnés. Pendant toute la durée du contrat, le souscripteur d’un contrat de capitalisation, personne physique ou personne morale, est titulaire d’une créance auprès de l’assureur. Il peut demander la restitution du capital, à tout moment ou au terme fixé à la souscription, en numéraire ou en unités de compte. L’évolution de son cadre légal en 2018(1) et doctrinal en 2019(2) a fait naître un regain d’intérêt des professionnels du patrimoine à son égard. Toutefois, faute de parfaite exhaustivité, les textes présentent des difficultés d’interprétation qui nécessitent d’adopter des pratiques conciliant habileté et déontologie fiscales afin de garantir la sécurité des épargnants. En effet, la fiscalité repose sur deux paramètres : le taux et l’assiette. Si la question du taux d’imposition ne soulève, a priori, aucune difficulté d’interprétation, celle de l’assiette mérite certains approfondissements que le détenteur soit une personne physique ou une personne morale (à l’IS). Le contrat de capitalisation à l’IR Si son offre financière est similaire à celle de l’assurance-vie, l’incontournable placement préféré des Français, il s’en distingue par des mécanismes juridiques spécifiques. Contrairement à l’assurance-vie, qui couvre le risque de décès, le contrat de capitalisation n’a pas pour fondement la stipulation pour autrui. Cela n’exclut en rien sa transmissibilité, bien au contraire. Contrairement à des titres que le donateur peut transmettre « par tradition » (don manuel dématérialisé par virement de compte à compte), le donateur doit recourir à un acte notarié pour transmettre son contrat. Au-delà de la sécurité juridique garantie par l’homme de l’art, la forme de la transmission est imposée par la nature du droit du souscripteur : s’agissant d’une créance à faire valoir sur une compagnie d’assurance, seul le recours à un écrit (article 1321 du Code civil), et donc un acte notarié, permet de constater la mutation(3). Par ailleurs, la transmission du contrat par donation ou décès n’emporte pas de conséquences sur la date de souscription. En effet, la doctrine administrative préserve l’antériorité fiscale malgré la mutation à titre gratuit : la date initiale de souscription détermine le taux d’imposition applicable (BOI-RPPM-RCM-30-10-20-20-20220630 § 120). Transmission par donation en pleine propriété ou décès La transmission du contrat de capitalisation ouvre des avantages en matière de fiscalité : « en cas d’acquisition à titre gratuit du bon ou contrat, le prix d’acquisition s’entend de la valeur vénale retenue pour le calcul des droits de mutation à titre gratuit » (BOI-RPPM-RCM-20-10-20-50-20191220 § 225). En d’autres termes, en cas de décès ou de donation, la fiscalité sur les produits latents est purgée au jour de la transmission. Il convient de préciser que cette réactualisation du prix d’acquisition neutralise l’assiette tant en matière d’impôt sur le revenu que de prélèvements sociaux, l’assiette retenue pour ces deux « impositions » étant identique (article L. 136-7 du Code de la Sécurité sociale). Toutefois, contrairement aux titres, les droits acquittés par les héritiers ou les donataires ne peuvent majorer le prix d’acquisition du contrat et donc minorer le produit imposable. Ainsi, le rachat post-transmission en pleine propriété du contrat de capitalisation ne soulève pas de difficulté d’interprétation. Cette règle s’appliquerait également si à l’occasion de la transmission (un décès) un droit en usufruit est né (au profit du conjoint survivant) et corrélativement un droit en nue-propriété (au profit d’un enfant) par transposition des dispositions applicables aux plus-values mobilières : - du vivant des parties, lorsque « ni le nu-propriétaire, ni l’usufruitier, n’ont disposé de la pleine propriété des titres cédés avant leur démembrement », le prix d’acquisition s’entend de « la valeur globale retenue pour la détermination des droits […] lors de la mutation à titre gratuit qui a donné lieu au démembrement de la propriété » (BOI-RPPM-PVBMI-20-10-20-60-20191220 § 120 & 210) - post-décès de l’usufruitier, « le prix d’acquisition à retenir est égal à la somme des valeurs vénales déclarées pour chacun de ces droits lors de la transmission à titre gratuit qui est à l’origine du démembrement de la propriété » (BOI-RPPM-RCM-20-10-20-50-20191220 § 225) La transmission par donation avec réserve d’usufruit Les textes n’abordent pas de manière spécifique la transmission de la nue-propriété d’un contrat de capitalisation. Il n’en demeure pas moins que cette nature de transmission devrait emporter la même purge sur la quote-part de produits correspondant à la valorisation de la nue-propriété. Il convient alors de s’interroger sur les conséquences d’un rachat du vivant de l’usufruitier et du nu-propriétaire, ou après le décès de l’usufruitier lorsque le nu-propriétaire est devenu plein-propriétaire. Rachat du vivant de l’usufruitier et du nu-propriétaire post-donation Lors du rachat d’un contrat de capitalisation par analogie aux dispositions relatives aux plus-values mobilières, « le prix d’acquisition à retenir pour la détermination de la plus-value imposable est constitué par le prix ou la valeur d’acquisition initiale de la pleine propriété des titres majoré de l’accroissement de valeur de la nue-propriété constaté entre la date de l’acquisition initiale de la pleine propriété et la date de transmission de la nue-propriété » (BOI-RPPM-PVBMI-20-10-20-60-20191220 § 160). Autrement dit, le prix d’acquisition retenu pour déterminer l’assiette des produits taxables serait égal à la valeur du droit donné majoré de la fraction des primes versées sur le contrat par l’usufruitier par application de l’article 669 du Code général des impôts. Rachat par le plein propriétaire (ex-nu-propriétaire) post-décès du donateur Une première interprétation consisterait à retenir le prix d’acquisition du contrat selon sa valeur en pleine-propriété au jour de la donation conformément aux dispositions en matière de plus-value immobilière : « […] il est admis de retenir pour le calcul de la plus-value immobilière imposable, la valeur vénale de chacun des droits (donc la valeur de la pleine propriété) à la date d’entrée de la nue-propriété dans le patrimoine du cédant » (BOI-RFPI-PVI-20-10-20-10-20120912 § 350). Toutefois, bien que favorable au donataire et conforme à l’esprit de l’aménagement de 2019, cette interprétation semble délicate à retenir dans la mesure où elle conduirait à purger la totalité des produits en compte au jour de la donation du contrat alors que seule la nue-propriété a été transmise. Aussi, une seconde interprétation, vraisemblablement à appliquer, consisterait à retenir le prix d’acquisition du contrat selon sa valeur en nue-propriété au jour de la donation par analogie aux dispositions applicables aux plus-values mobilières (BOI-RPPM-PVBMI-20-10-20-60-20191220 § 200) : « lorsque l’usufruit a été acquis par voie d’extinction (notamment en cas de décès de l’usufruitier), son prix d’acquisition est nul. En cas de cession ultérieure de la pleine-propriété des titres, le prix d’acquisition à retenir est celui de la nue-propriété ou sa valeur vénale retenue lors de la transmission à titre gratuit. » L’application de cette disposition conduit à constater une plus-value mécanique, la valeur retenue de la nue-propriété au moment de la donation étant probablement inférieure aux primes versées sur le contrat par le souscripteur initial. Pour reprendre l’exemple, l’assiette imposable serait 125 000 euros, alors que le montant des primes versées est de 200 000 euros. Afin de sécuriser l’épargnant, il est recommandé d’interroger les compagnies d’assurance ayant la charge de déterminer l’assiette de l’impôt (voire de s’en acquitter) afin d’anticiper le traitement fiscal d’un tel rachat. Un rescrit dont le retour serait favorable est évidemment un moyen de garantir l’assiette fiscale retenue. Pour éviter cet écueil et réactualiser le prix de souscription, il serait envisageable de procéder à un rachat total du vivant de l’usufruitier afin de remployer les fonds dans la souscription d’un nouveau contrat de capitalisation démembré. Dans cette hypothèse, en cas de rachat ultérieur par le nu-propriétaire devenu plein-propriétaire, l’imposition devrait être calculée en retenant le montant total des primes versées à titre de prix de revient. Seul bémol, l’antériorité fiscale serait décomptée en fonction de la date de souscription du nouveau contrat. Une autre stratégie consiste à interposer une société civile pour détenir le contrat de capitalisation. Plus élitiste, compte tenu de la nécessité de constituer la société et de tenir une comptabilité, ce mode de détention permet de faire porter le démembrement sur les parts sociales et non plus le contrat lui-même. Or il convient de résoudre une autre difficulté liée à la nature du contrat de capitalisation qui, par définition, n’est pas frugifère : par défaut, le résultat de la société civile est nul et l’usufruitier ne pourra rien appréhender. Même en cas de rachat partiel, le résultat comptable et fiscal est faible, puisque seule la part d’intérêts comprise dans le rachat (soit une fraction du rachat) est taxable et concourt au résultat comptable. Pour pallier cet inconvénient, il est possible de déterminer statutairement le résultat comptable à partir de l’écart de réévaluation. Cet écart correspond à l’accroissement de la valeur du contrat en cours d’exercice même si la société ne bénéficie d’aucune perception en l’absence de rachat. Au sein d’une société transparente, ce résultat peut être distribué et inscrit en compte courant d’associé sans fiscalité seuls les revenus déterminés selon les règles de l’article 125-0 A du CGI (à savoir un rachat) étant un fait générateur d’imposition (Conseil d’Etat, 14 avril 2022, n° 454264). Si l’usufruitier souhaite percevoir ce résultat distribuable, la société civile procédera à un rachat partiel à due concurrence pour obtenir la trésorerie nécessaire. Pleinement propriétaire du contrat, la fiscalité de droit commun due par l’usufruitier des parts s’appliquera sur la quote-part du produit du rachat. Une enveloppe stratégique pour certains supports et certains souscripteurs Malgré certaines incertitudes en cas de démembrement, le contrat de capitalisation constitue une solution d’épargne particulièrement adaptée aux supports nécessitant un horizon de placement long pour déployer pleinement leur potentiel de performance, notamment lorsque l’avancée en âge réduit l’incertitude liée à la date de transmission. Si l’assurance-vie demeure un véhicule d’investissement pertinent, son dénouement en cas de décès impose une cession prématurée des supports afin de restituer des liquidités aux bénéficiaires(3) (sauf dans de rares exceptions où une remise en titres est sollicitée, article A132-9-2 du C. Ass.). Ce dénouement s’avère préjudiciable lorsque les supports sont en moins-value « normale et prévisible »(4) . En revanche, la transmission « en l’état » du contrat de capitalisation préserve l’allocation d’actifs et donc les supports (Private Equity, Private Debt, produits structurés, etc.) qui requièrent une détention long terme pour délivrer leur rendement. Le contrat de capitalisation à l’IS Comme évoqué, le contrat de capitalisation peut être souscrit aussi bien par une personne morale à l’IR que par une personne morale à l’IS. Il constitue un excellent outil de capitalisation de la trésorerie grâce à sa souplesse en matière d’allocation d’actifs. En effet, l’architecture financière des contrats modernes offre un univers d’investissement particulièrement riche. Toutefois, conformément aux recommandations de France assureurs(5), seules les personnes morales à l’IS considérées comme patrimoniales peuvent souscrire auprès d’un assureur français(6). En effet, ces contrats personnes morales offrent un accès aux fonds en euros, un des piliers essentiels dans les stratégies d’investissement. Afin de garantir la liquidité, la garantie du capital, la capitalisation des intérêts et une performance optimale, les compagnies d’assurance ont besoin d’une stabilité des encours sur ces fonds. Or cette stabilité pourrait être fragilisée par des mouvements opportunistes d’entrées et de sorties de capitaux en fonction des évolutions du marché. L’éligibilité de la personne morale au contrat de capitalisation constitue ainsi une mesure protectionniste, qui est renforcée par des pénalités dégressives et dissuasives en cas de rachat lorsque l’allocation comprend des fonds en euros. Ces pénalités prennent fin au terme d’un délai de quatre ans. La fiscalité du contrat de capitalisation à l’IS Une fiscalité forfaitaire pendant la durée du contrat Le contrat de capitalisation est soumis au régime fiscal particulier des primes de remboursement aléatoires codifié à l’article 238 septies E du CGI. Ce régime prévoit le rattachement des primes de remboursement aux résultats imposables de la société au titre de chaque exercice selon une répartition actuarielle pendant toute la durée du contrat (7) . Ainsi, la fraction de la prime de remboursement à rattacher fiscalement au résultat imposable de chaque exercice est fixée forfaitairement en retenant comme taux d’intérêt actuariel, 105 % du dernier taux mensuel des emprunts d’Etat (TME) connu à la souscription. L’assiette taxable n’est donc pas linéaire. Elle progresse à hauteur des intérêts forfaitaires capitalisés sans corrélation avec la valorisation réelle du contrat. L’évolution des TME influence directement la fiscalité à supporter pendant la période de capitalisation : lorsque les TME étaient faibles, voire nuls (période 2018-2021), la faible fiscalité (voire l’absence) offrait (et offre toujours pour les contrats souscrits pendant cette période) une « surcapitalisation » à long terme. A contrario, dans un contexte de politique monétaire moins accommodante, l’allocation d’actifs doit offrir des perspectives de rendement plus attractives pour continuer à bénéficier pleinement de ce levier. Par ailleurs, en cas de « réelle » moins-value latente, une provision pour dépréciation est comptabilisée. Une régularisation de l’impôt à terme En cas de gains, la base taxable à l’IS est égale à la différence entre la valeur réelle du contrat à la date du rachat et la valeur des primes versées majorées de l’imposition déjà payée. En cas de pertes constatées lors du rachat ou si le cumul des produits forfaitaires imposés annuellement est supérieur au montant du gain réel, la différence devrait entraîner une perte imputable sur le résultat de l’exercice (s’il en résulte un déficit annuel, son imputation sera reportable dans les conditions de droit commun). Opportunité du contrat de capitalisation au regard des autres solutions de placement de trésorerie La souscription d’un contrat de capitalisation permet de dynamiser la gestion de trésorerie dite structurelle, et facilite la gestion administrative et comptable des investissements financiers d’une personne morale à l’IS. Le contrat étant une sorte « d’universalité », l’investissement présente une seule ligne à l’actif de la société contrairement à l’acquisition « directe » de titres ou d’organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM). Le contrat de capitalisation porte bien son nom, mais il requiert une parfaite maîtrise des enjeux liés à sa détention, son acquisition et sa transmission. Si le taux d’imposition, qu’il s’agisse de l’IR ou de l’IS, est établi, la détermination de l’assiette fiscale demeure plus complexe. Faire appel à un conseil avisé permet d’anticiper les écueils et d’exploiter pleinement le potentiel de cette enveloppe patrimoniale. 1. Loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 - article 125 0 A modifié du CGI. 2. BOI-RPPM-RCM-20-10-20-50-20220630. 3. Certains contrats assurent le capital investi grâce à des garanties décès plancher qui cessent généralement à partir de 70 ans. 4. Par construction, la plupart des fonds de Private Equity suivent une courbe en J. 5. France assureurs, Recueil des engagements à caractère déontologique des entreprises membres de la fédération, page 48. 6. Certaines compagnies offrent la possibilité aux personnes morales commerciales de souscrire des contrats de capitalisation ne donnant accès qu’à des unités de comptes. 7. Lorsque la prime de remboursement excède 10 % de la valeur de souscription du contrat.
Acquérir sa résidence principale avant ou au cours du mariage, quelles conséquences ? Le logement de la famille bénéficie d’une protection particulière. Même s’agissant d’un bien personnel, l’accord des deux époux est nécessaire pour disposer du logement de famille (vente, résiliation du bail, hypothèque). Communauté légale de biens réduite aux acquêts Si l’acquisition a lieu avant le mariage : le logement est un bien propre de l’époux acquéreur ou un bien indivis si l’acquisition est réalisée par les deux époux. Si l’acquisition a lieu après le mariage : le logement est un bien commun. Remarque : lorsque la promesse unilatérale de vente est signée par un époux avant le mariage, mais que l’acte définitif de vente est signé après le mariage, le logement sera commun. En effet, la promesse n’engage que le promettant, pas le bénéficiaire. Lorsque la promesse synallagmatique de vente (ce qu’on appelle « compromis de vente ») est signée avant le mariage par un époux et que l’acte définitif de vente est signé après le mariage, le logement acquis est en principe propre. Toutefois, si le compromis prévoit le transfert de la propriété au jour de la signature de l’acte définitif de vente notarié (ce qui est généralement le cas), alors le logement sera commun. Séparation de biens avec société d’acquêts Si l’acquisition a lieu avant le mariage : le logement est un bien personnel de l’époux ou un bien indivis si l’acquisition est réalisée par les deux époux. Toutefois, lors de la signature du contrat de mariage, il est possible d’apporter ce logement à la société d’acquêts. Si l’acquisition a lieu après le mariage : la qualification dépend de l’étendue de la société d’acquêts qui conduit en général à qualifier le logement de bien commun. Si la société d’acquêts est à objet limité et inclut tout bien immeuble affecté à la résidence principale des époux : le logement est commun. Si la société d’acquêts est étendue à l’ensemble des immeubles : le logement est commun. Si la société d’acquêts est étendue à l’ensemble des acquêts : le logement est commun. Avis Bien que la question n’ait pas été tranchée en jurisprudence, il nous paraît possible de faire entrer un bien futur, tel que le logement de la famille, dans la société d’acquêt. La doctrine est toutefois partagée sur ce point. Le financement de l’acquisition doit être prévu lors de la rédaction du contrat afin d’éviter le jeu des récompenses qui viderait en substance la société. Remarque : en raison du principe d’immutabilité du régime matrimonial, le bien qualifié d’acquêt en raison de son affectation à la résidence principale des époux doit rester un acquêt même lorsque l’occupation à titre de résidence principale cesse. Le contrat de mariage doit anticiper ces difficultés.
La création d’une entreprise est un sujet délicat et mystérieux qui demande une certaine dose d’inconscience, voire de folie : s’il savait par avance les dangers qu’il devra affronter, il est probable que l’entrepreneur renoncerait à son projet. Le sujet devient plus compliqué dans la gestion d’une entreprise par une collectivité familiale. Certes, la famille n’a pour ainsi dire pas de limite ni à la mobilisation ni à l’effort. Mais en contrepartie, elle est incroyablement susceptible, possède une mémoire transgénérationnelle aiguë et exige de nombreux égards. Cependant, le plus grand défi survient lorsqu’il faut préparer la transmission de l’entreprise familiale, organiser son pouvoir et utiliser les techniques de passation de cet actif somme toute spécial aux générations ultérieures. Dans la vie des affaires, on rencontre trois types d’entreprises : les entreprises dont l’actionnaire est l’Etat, comme la Sncf ou EDF, les entreprises cotées dont le capital est dispersé dans le public, comme Axa, Total ou BNP, ou encore les entreprises familiales, qui sont en principe détenues majoritairement par des personnes physiques issues d’une même famille. La dernière catégorie caractérise l’entreprise dite « familiale » détenue par une ou plusieurs familles actionnaires dont l’objectif est la croissance, la pérennité, la conservation et la transmission au profit des générations ultérieures. Outre les questions juridiques et fiscales, la transmission familiale est concernée par la gouvernance et l’idée d’une culture familiale, un « affectio familiae », caractérisant l’ensemble de relations affectives contribuant à un projet commun. Ainsi, la transmission (réussie) de l’entreprise familiale nécessite de réunir bien plus de savoir-faire que dans la transmission d’un portefeuille de valeurs mobilières. L’idée fondamentale est la préservation de l’outil économique et familial. Il s’agira de lutter contre une imparfaite transmission des clefs de l’entreprise, et contre une sous-estimation des contingences juridiques et fiscales. Cela suppose ainsi d’organiser les rapports entre membres d’une même famille, entre les actionnaires, et entre la famille et l’entreprise. C’est un véritable défi. Un processus raisonné d’anticipation 50 % des entreprises vont rentrer dans un processus de transmission ou de vente, au cours des dix prochaines années. Cependant, seulement 25 % des familles ont entrepris un processus raisonné d’anticipation de la transmission de la direction et des titres de l’entreprise. Bien évidemment, les entreprises familiales sont multiformes, par leur taille, leurs modalités d’organisation ou leur géographie. La pérennité de l’entreprise qui existe parfois depuis plusieurs générations ne peut être garantie si sa gouvernance n’est pas prise en compte : il s’agit de combiner la manière dont s’articulent les pouvoirs qui la constituent entre pouvoir des actionnaires, pouvoir exécutif et pouvoir de surveillance. Enfin, l’entreprise familiale n’est pas un individu qui opère seul des choix : elle regroupe une famille et son histoire, qui doit être conservée et préservée, tout en lui permettant d’évoluer. La pérennité de l’entreprise est strictement liée au succès de sa transmission qui est rendue complexe entre générations et branches familiales. L’allongement notable de la durée de vie oblige à penser paradoxalement plus tôt et plus loin. En clair, il n’est pas raisonnable d’attendre l’âge de quatre-vingt-dix ans pour transmettre à ses enfants qui seront alors âgés de cinquante-cinq à soixante-cinq ans et qui ne disposeront pas de la même énergie qu’à trente et quarante ans. Sans compter qu’il devient possible de passer au-dessus d’une génération qui aura accumulé frustrations et déceptions. Il faut tout changer pour que rien ne change. Pour assurer ses chances, même « en temps de paix », quand tout va bien au sein de l’entreprise et de la famille, il est nécessaire de mettre en place plusieurs outils. La charte familiale C’est un document par lequel la famille fixe les principes qu’elle entend suivre et/ou qu’elle entend développer dans le contexte de l’entreprise familiale. Outil conceptuel et pratique définissant et encadrant les thèmes majeurs des relations interpersonnelles dans le long terme, elle a vocation à promouvoir le sentiment d’appartenance et de responsabilité. La charte peut contenir des dispositions concernant la politique d’investissement des actifs tirés de l’outil professionnel, les projets philanthropiques de la famille, la définition du périmètre familial, l’ouverture et/ou les restrictions concernant l’accès au capital, la fixation des règles de répartition de pouvoir entre chaque branche, les modalités d’accès aux postes de direction, entre autres, le comportement des membres de la famille, notamment au regard des règles de confidentialité ou de représentation en public, les modalités de modification de la charte et de résolution des conflits. La charte familiale contient un engagement moral qui peut toutefois revêtir une valeur juridique selon la portée qu’on souhaite lui conférer. L’assemblée familiale L’assemblée familiale regroupe tous les membres de la famille (dépendant de la définition qu’on a bien voulu lui donner) afin de définir et mettre en œuvre la gouvernance familiale. Elle a pour but principal d’assurer une information complète, uniforme et continue des membres de la famille sur l’évolution de l’entreprise. Elle permet d’organiser la gestion des actifs familiaux qui ne sont pas liés à l’entreprise. C’est une assemblée visant à donner du corps à la famille, de l’appartenance et de l’identité spécifique. Le conseil de famille Organe plus restreint, c’est un conseil exécutif prenant des décisions dans le sens déterminé par l’assemblée familiale. A ce titre, le conseil de famille permet de préparer et organiser la tenue de l’assemblée familiale afin de faciliter le dialogue et favoriser une bonne gouvernance familiale, résoudre les éventuels conflits, délibérer sur les questions liées à l’entreprise ou encore coordonner les intérêts des membres de la famille avec ceux de l’entreprise. Il permet aussi des rappels à l’ordre. Dans le cas de ces deux institutions, d’où il émane une forte valeur morale, on n’insistera jamais assez sur la question de la communication qui doit être fiable et ciblée. Le pacte familial Il s’agit d’un instrument plus contraignant que la charte, car fixant des engagements juridiques assortis de sanctions le cas échéant. Il est la traduction juridique de tout ou partie de la charte. C’est un pacte d’associés entre membres familiaux qui demeure un engagement extra-statutaire. Le non-respect d’un pacte, d’associé ou familial, est susceptible d’entraîner des dommages-intérêts. En revanche, une décision d’une assemblée générale en violation des statuts conduit à la nullité de la décision. Les statuts de l’entreprise ont une portée toute particulière car une décision d’une assemblée générale en violation des statuts conduit à sa nullité. Ils ont donc une force juridique supérieure au pacte familial. La préparation, l’anticipation et la clarté d’une organisation permettent de fluidifier les décisions familiales pour la préservation de l’entreprise. Une fois ces éléments élaborés, ou en cours d’élaboration, il sera possible alors de procéder à la transmission de l’entreprise dans de bien meilleures conditions. Plusieurs modalités sont offertes pour le passage à la génération suivante. La donation-partage C’est un acte juridique par lequel le donateur procède de son vivant à une disposition à titre gratuit. La donation est la répartition de ses biens ou certains de ses biens, suivie du partage entre deux ou plusieurs héritiers. La donation-partage permet ainsi de composer des lots et de réaliser avant l’heure fatidique la répartition des biens entre les futurs héritiers, tout en fixant définitivement les valeurs de lots donnés aux bénéficiaires, puisque ces dernières ne seront pas rapportables à la succession de leur auteur. Elle permet également d’éviter les difficultés de l’indivision successorale entre les héritiers, source de difficultés en cas de mésentente entre eux. La donation-partage est réalisée du vivant du donateur. Celui-ci maîtrise mieux la valeur d’un actif que des héritiers au moment du décès de leur père ou de leur mère, il est à même de procéder à des choix qui seront moins contestés ou mieux acceptés qu’au moment d’un décès. Fixant, en principe, des règles devant éviter l’impréparation d’un décès subi, la donation-partage anticipe ainsi la succession avec une acuité singulière. La donation-partage transgénérationnelle Cette opération a pour but d’accélérer la transmission du patrimoine aux générations suivantes en permettant de gratifier des donataires copartagés qui sont des descendants de générations différentes. L’ascendant peut ainsi doter des descendants de degrés différents (des grands-parents peuvent doter leurs petits-enfants). En revanche, l’attribution des différents lots doit être réalisée par souche, et non par bénéficiaire. La liquidation de la succession du donateur se dénouera comme s’il avait alloti ses seuls enfants. La donation-partage transgénérationnelle permet, à dessein, de « gagner » une génération, sans priver la génération intermédiaire d’un revenu qui lui est nécessaire. La donation démembrée La donation démembrée permet au donateur de conserver le revenu de l’entreprise, dont la nue-propriété est transmise aux nus-propriétaires. Cette donation permet de transmettre sur une base plus faible que celle de la pleine-propriété en fonction de l’âge de l’usufruitier. Les rapports usufruitiers/nus-propriétaires pourront être fixés contractuellement de manière, par exemple, à déterminer qui peut avoir le pouvoir de déclencher la vente des titres le cas échéant. En revanche, en cas de pacte Dutreil, l’usufruitier devra se borner à ne voter qu’aux assemblées ordinaires. Le pacte Dutreil Le pacte Dutreil a pour objectif d’éviter la disparition des entreprises familiales ou leur cession à des tiers. En effet, la France comporte le triste privilège d’être située dans le groupe de tête des droits de mutation à titre gratuit en ligne directe : 45 % au-delà d’1,8 million d’euros par donateur/successible et par bénéficiaire/héritier. Le pacte Dutreil n’est pas une modalité de transmission, mais un moyen sous conditions strictes de diminuer la facture fiscale au moment de la transmission. En outre, étant un contrat, il invite la famille à contractualiser ses rapports si cela n’avait pas déjà été organisé, au-delà même du pacte Dutreil. Dans notre exposé, il présente un triple intérêt : anticiper la transmission et ne pas attendre le vieillissement des dirigeants et de l’entreprise ; créer et organiser les organes de gouvernance et de décision ; et enfin de conserver l’intégrité économique de l’outil transmis. Lors d’une transmission à titre gratuit d’actions ou de parts sociales, la souscription d’un pacte Dutreil entre actionnaires familiaux permet de bénéficier d’un abattement de 75 % de la valeur des biens donnés (sans limitation de montant) pour le calcul des droits de mutation à titre gratuit. Il est possible de diminuer les droits de donation de 50 % si le donateur à moins de soixante-dix ans, et cela peut se cumuler avec une donation avec réserve d’usufruit. Le régime du pacte Dutreil repose principalement sur la combinaison de deux engagements de conservation. Dans un premier temps, les associés doivent prendre un engagement collectif de conservation des titres de la société pour une durée minimale de deux ans. L’engagement collectif – qui est un contrat – doit être souscrit par le donateur, pour lui et ses ayants-cause à titre gratuit, avec en principe au moins un autre associé de la société, pour une durée minimale de deux ans, qui court à compter de l’acte authentique ou de la date d’enregistrement du pacte à la recette des impôts si l’acte a été signé par acte sous seing privé. Le pacte doit être en cours au jour de la transmission, et il implique, à compter de la transmission, que les donataires poursuivent l’engagement collectif jusqu’à son terme, puis que chacun d’entre eux respecte un engagement individuel de conservation de quatre ans. Le donataire des parts ou actions transmises doit prendre lors de la transmission (en pratique, dans l’acte de donation), pour lui et ses ayants-cause à titre gratuit, l’engagement individuel de conserver les titres reçus pendant quatre ans à compter de l’expiration de l’engagement collectif de conservation. L’engagement est individuel, ainsi son non-respect par l’un des bénéficiaires de la transmission ne remet pas en cause le bénéfice de l’exonération partielle dont ont bénéficié les autres donataires. L’engagement collectif Dutreil doit avoir une durée minimale de deux ans, et doit être en cours au jour de la transmission. A cet égard, il est tentant de conclure un pacte pour une durée minimale de deux ans, tacitement reconduite d’année en année, afin de couvrir un risque de décès d’un actionnaire signataire. Dans une telle hypothèse, néanmoins, l’engagement doit toutefois être dénoncé pour les donataires (ou héritiers) afin de faire démarrer la période incompressible d’engagement individuel de quatre ans, tandis que le pacte ne resterait valable pour les autres signataires que si ces signataires restant engagés représentaient les minima requis de détention du capital. En cas de non-dénonciation du pacte, les obligations de détention peuvent dépasser les six ans minimums prescrits par la loi. Il est recommandé de conclure des pactes pour une durée fixe de deux ans tous les deux ans et, le cas échéant, de les démultiplier avec différents groupes d’actionnaires. Au moins un pacte serait, en effet, en cours à chaque projet de transmission, et le démarrage de l’engagement individuel serait acquis sans requérir de formalisme de la part des personnes soumises à ces engagements. C’est donc un outil vertueux grâce auquel l’entreprise est transmise plus tôt et mieux, avec un coût fiscal qui n’affecte pas ou peu la substance économique de l’entreprise. Son application et l’avantage qui en découle sont soumis à des conditions fines et complexes qui nécessitent un accompagnement par des professionnels avertis. Le LBO (Leverage Buy-Out) Cette opération survient lorsque la transmission des titres de l’entreprise familiale ne peut s’opérer de manière égalitaire. En effet, lorsque la transmission à titre gratuit de titres n’est envisagée qu’au profit d’un héritier repreneur (ou plusieurs) à l’exclusion d’autres héritiers, un volet spécifique du régime Dutreil pourra être utilisé afin de permettre au repreneur de faciliter sa structuration de détention. Au centre de cette transmission inégalitaire, un « dédommagement » ou soulte permettra à l’héritier repreneur de désintéresser ses cohéritiers, en lieu et place pour ces derniers d’une allocation en titres dans la perspective d’une revente à court terme, incompatible avec les obligations requises pour le régime Dutreil. Le LBO est une stratégie d’acquisition d’une entreprise par effet de levier. L’acheteur de l’entreprise crée une holding de rachat qui recourt au financement bancaire pour acquérir l’entreprise-cible. Une partie du résultat de l’entreprise-cible est alors affectée au remboursement de la dette par une remontée de dividendes au profit de la holding de rachat favorisé fiscalement par l’application du régime mère-fille ou de l’intégration fiscale. Cette technique peut également être utilisée par le dirigeant souhaitant dégager des liquidités. Il s’agit d’une vente à soi-même ou « Owner Buy Out » (OBO). Cette variante du LBO consiste pour les actionnaires familiaux à créer leur holding de rachat qui s’endette afin de racheter leurs titres dans l’entreprise et de rendre liquide une partie de leur capital professionnel. Le Family Buy Out dit FBO s’analyse en une opération globale organisant la transmission de l’entreprise familiale et combinant mutation de propriété des titres à titre gratuit et à titre onéreux. Ce mécanisme trouve son succès dans la possibilité pour les repreneurs familiaux qui ont perçu l’entreprise en tout ou en partie à titre gratuit en régime Dutreil, de pouvoir à leur tour transférer cette propriété à une société holding qui pourra recourir aux effets de leviers juridiques, fiscaux et financiers en vue de la prise en charge d’une soulte consécutive à un partage et/ou du rachat d’une partie des titres des actionnaires familiaux sortant. Le FBO permet le cumul des modes de transfert de la propriété de l’entreprise au sein de la famille. Le plus souvent, la transmission à titre gratuit de l’entreprise sera réalisée par voie de donation-partage, à la suite de laquelle une soulte pourra être transférée à une société holding qui se sera endettée à cet effet. En synthèse La famille dont les donateurs entameraient un processus de réflexions et de mise en œuvre d’une gouvernance raisonnée, et qui fixerait par écrit et contractuellement ses relations (charte familiale, assemblée familiale, conseil de famille, adaptation des statuts de l’entreprise familiale), dont les membres auraient moins de soixante-dix ans, qui viendraient à démembrer leurs titres familiaux dans le cadre d’une donation transgénérationnelle dans le cadre d’un FBO avec soulte, sous l’empire d’un pacte Dutreil, auraient nettement plus de facilités à conserver leur entreprise. En effet, ils risqueraient moins de devoir céder leur entreprise, ou d’ouvrir le capital à des tiers, afin de payer ses DMTG qui seraient dus massivement en cas de décès. En outre, ce processus de structuration et de transmission permettrait de percevoir les fonds issus du FBO, dont une fraction pourrait financer tout ou partie des droits de donation. L’effort à accomplir relève parfois plus d’un effort psychologique et de constance qui peut perturber les dirigeants familiaux entièrement tournés vers la bonne marche de l’entreprise familiale. Outre la question fiscale qui occupe et préoccupe les actionnaires-dirigeants, il faut une grande motivation politique pour amener la famille à se remettre en question, et aller au bout d’un chemin qui entraîne nécessairement des frottements familiaux. Ces mutations familiales peuvent apparaître compliquées et risquées. En tout cas, ils ne relèvent pas nécessairement de la compétence habituelle des instigateurs de ces changements : diriger une entreprise est différent, sinon éloigné de la gestion et de l’organisation des vertus familiales. Il est nécessaire d’aborder ces sujets avec, certes, des ambitions, mais en acceptant de considérer que le résultat final pourra être différent de ce qui avait été envisagé au départ de la réflexion. La famille peut avoir des points de vue plus ou moins nuancés ou contraires aux idées auxquelles aspirent les initiateurs de la réforme et qui se sont lancés dans l’aventure de la structuration. Autrement dit, partir avec des idées préconçues en vue de les imposer présente un risque fort d’échec et de déstabilisation de la Famille et de l’entreprise. Il convient donc d’être particulièrement prudent, et le cas échéant accompagné et aidé par des professionnels chevronnés. Il ne sert à rien d’avoir raison, il faut convaincre ! Malgré les confrontations et les négociations, les difficultés et les succès, la transmission de l’entreprise familiale, dans cette cohabitation entre technique juridique et pâte humaine, demeure un des sujets les plus riches auquel il est permis de participer. Familles, je vous aime !
L’assurance-vie a réalisé la passe de trois au cours du premier trimestre 2025, avec des collectes nettes supérieures à 4 milliards d’euros chaque mois. Les ménages plébiscitent ce placement qui, grâce à l’amélioration du rendement des fonds en euros, a retrouvé des couleurs. Ils réallouent une partie de l’épargne accumulée ces dernières années sur des produits de court terme, devenus moins rémunérateurs avec la baisse des taux. Un mois de mars de haute tenue La collecte nette a atteint 4,0 milliards d’euros en mars, après 5,8 milliards en février et 4,5 milliards en janvier. À titre de comparaison, elle s’élevait à 3,2 milliards d’euros en mars 2024. Il faut remonter à mars 2010 pour retrouver un niveau plus élevé sur ce mois, avec une collecte nette de 6,284 milliards d’euros — un record sur quinze ans. Depuis 1997, seules trois décollectes nettes ont été enregistrées en mars : en 2020 (-1,842 milliard d’euros, en lien avec la crise du Covid), en 2017 (-9 millions d’euros) et en 2012 (−1,378 milliard d’euros, en lien avec la crise des dettes souveraines). Sur les dix dernières années, la collecte moyenne du mois de mars s’établit à environ 1 milliard d’euros. Celle de 2025 est donc quatre fois supérieure à cette moyenne décennale. La collecte nette a été positive à hauteur de +3,4 milliards d’euros pour les supports en unités de compte (UC), et de +0,6 milliard pour les supports en euros. Ces derniers enregistrent ainsi deux collectes nettes consécutives, traduisant un retour en territoire positif. Des cotisations dynamiques Depuis plusieurs mois, l’assurance vie bénéficie de cotisations soutenues. Les ménages réaffectent une partie de leur épargne de court terme vers ce placement. En 2023 et 2024, ils avaient privilégié les dépôts à vue et les livrets réglementés, qui offraient des rendements attractifs. L’encours des dépôts à vue est passé de 406 milliards à plus de 500 milliards d’euros entre 2019 et 2023. Avec la décrue des taux directeurs, ces placements deviennent, mois après mois, moins intéressants. La baisse du rendement du Livret A incite désormais les ménages à privilégier les placements de long terme, au premier rang desquels figure l’assurance vie. En mars, le montant des cotisations brutes a atteint 15,5 milliards d’euros, un niveau record. En mars 2024, il avait déjà atteint un sommet comparable à 15,504 milliards d’euros. Des prestations plutôt stables Les prestations versées en mars 2025 se sont élevées à 11,5 milliards d’euros, contre 12,321 milliards en mars 2024. Elles demeurent relativement stables d’un mois sur l’autre. Le redémarrage encore lent du marché immobilier ne conduit pas les ménages à effectuer des retraits sur leurs contrats d’assurance vie pour financer l’achat d’un logement. Un premier trimestre prometteur Le contexte du premier trimestre 2025 a été porteur pour l’assurance vie. Avec un Livret A en perte d’attractivité, l’assurance vie s’impose comme le placement gagnant du premier trimestre. Sur les trois premiers mois, la collecte nette atteint 14,4 milliards d’euros, soit +5,6 milliards d’euros par rapport à la même période en 2024. Elle s’élève à +13,3 milliards pour les supports en UC, et à +1,1 milliard pour les supports en euros. Depuis le début de l’année, les cotisations brutes s’élèvent à 49,8 milliards d’euros, en hausse de +1,9 milliard par rapport à la même période en 2024. Les prestations, quant à elles, atteignent 35,4 milliards d’euros, en baisse de -9 %, soit -3,7 milliards d’euros. Un encours au-dessus des 2 000 milliards d’euros L’encours de l’assurance vie s’établit à 2 025 milliards d’euros à fin mars 2025, en hausse de +3,7 % sur un an. L’assurance vie face à l’effet Trump L’année 2025 a débuté sur les chapeaux de roue pour l’assurance vie, portée par le recul des rendements de l’épargne de court terme et la bonne tenue des marchés financiers. Mais les annonces du 2 mars dernier par Donald Trump concernant un relèvement des droits de douane rebattent en partie les cartes. Les marchés actions enregistrent de fortes variations au gré des déclarations du président américain, avec une tendance baissière. En revanche, les taux d’intérêt à long terme restent élevés, notamment en raison des besoins de financement croissants des États européens, en particulier dans le domaine de la défense. Le climat économique et géopolitique anxiogène pourrait conduire certains ménages à se tourner à nouveau vers des placements de court terme, comme le Livret A. Toutefois, le taux de ce dernier devrait être abaissé à environ 1,7 % au 1er août prochain, ce qui pourrait limiter cet attrait.
Les plus-values de cession de valeurs mobilières et/ou de droits sociaux sont en principe soumises à une imposition forfaitaire avec la soumission des gains au PFU de 30 % (dont 12,8 % d'IR et 17,2 % de prélèvements sociaux). La taxation au barème progressif de l'IR est devenue l'exception, ce mode d'imposition n'étant applicable que sur option (option globale s'appliquant obligatoirement à tous les revenus mobiliers et plus-values de cession de titres réalisées par le contribuable). En cas d'option pour l'imposition au barème progressif de l'IR, les gains peuvent bénéficier d'un abattement pour durée de détention (réservé aux titres acquis avant 2018). 1. Gains imposables Sont imposables dans la catégorie des plus-values mobilières (ou plus exactement des plus-values de cessions de valeurs mobilières, droits sociaux et titres assimilés), les produits (gains ou pertes) de cession à titre onéreux de valeurs mobilières et de droits sociaux réalisées par les contribuables dans le cadre de la gestion de leur patrimoine privé : valeurs mobilières cotées et assimilées (actions, obligations, parts de fonds communs de créance...) droits sociaux, actions et parts de sociétés (à l'exception des sociétés immobilières soumises à l'IR dont les cessions de titres sont imposables dans la catégorie des plus-values immobilières) certains titres non cotés : obligations, titres participatifs, effets publics, emprunts négociables émis par les collectivités (publiques ou privées) titres d'OPC (FCP, SICAV ou FCPR) droits portant sur ces valeurs ou titres Par cession à titre onéreux, on entend principalement : les négociations faites en bourse (sur une bourse française ou étrangère) les cessions effectuées entre particuliers (ventes, apports en société, échanges de titres, partages autres que des successions) Sont également imposables dans cette catégorie, les gains ou pertes résultant de la clôture d'un PEA avant l'expiration de sa 5ème année (ou dans certains cas, au-delà). Par ailleurs, les pertes constatées en cas d'annulation de titres intervenant dans le cadre d'une procédure collective de redressement, de cession ou de liquidation judiciaire, génèrent une moins-value imputable sur les gains de même nature. 2. Détermination de la plus-value imposable Le gain net retiré d'une cession est constitué par la différence entre : le prix de cession des titres, net des frais et taxes acquittés par le cédant et leur prix effectif d'acquisition par le cédant ou, en cas d'acquisition à titre gratuit, leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutation. Ce prix d'achat doit être augmenté des frais d'acquisition (honoraires d'experts, droits d'enregistrement...) Ces prix d'acquisition et de cession sont déterminés en tenant compte des clauses de variation de prix éventuellement insérées dans les actes de cessions des titres. Remarque : Par ailleurs, le prix d'acquisition doit être diminué de la réduction d'impôt obtenue le cas échéant, dans le cadre du dispositif Madelin (souscription au capital de PME, de FCPI, de FIP, de FIP OM et de FIP Corse). 3. Compensation des gains et des pertes Le montant du gain net ou de la perte nette est déterminé en faisant une compensation des gains et pertes réalisés au cours de l'année. Ce gain net (ou cette perte nette) est ensuite diminué (ou augmenté) des pertes subies au cours des années antérieures restant à imputer. Les moins-values subies au cours d'une année donnée sont imputables exclusivement sur les plus-values de même nature réalisées au cours de la même année ou des 10 années suivantes. Si la compensation fait ressortir un gain net, ce dernier peut être diminué par l'application d'un abattement proportionnel pour durée de détention et/ou d'un abattement fixe réservé aux dirigeants de PME cédant leurs titres à l'occasion de leur départ à la retraite. Le champ d'application de ces abattements se trouve considérablement réduit pour les cessions réalisées depuis 2018 du fait du rétablissement, à compter de cette même date, de l'imposition forfaitaire de ces gains. 4. Abattements Abattement dirigeant partant à la retraite Les dirigeants de PME cédant leurs titres à l'occasion de leur départ à la retraite peuvent bénéficier d'un abattement fixe de 500 000 €. Cet abattement s'applique quelles que soient les modalités d'imposition du gain (barème progressif de l'IR ou PFU). Pour les cessions réalisées depuis 2018, l'abattement fixe ne peut plus être cumulé avec l'abattement pour durée de détention. Ainsi, lorsque le gain est afférent à des titres acquis avant 2018 et qu'il est soumis au barème progressif de l'IR, le contribuable doit choisir entre cet abattement fixe ou l'abattement pour durée de détention. Abattements pour durée de détention Les abattements pour durée de détention ne s'appliquent que lorsque les 2 conditions suivantes sont remplies simultanément : les titres cédés doivent avoir été acquis avant 2018 le gain est imposé au barème progressif de l'IR (ce qui suppose, pour les cessions réalisées depuis 2018, que le contribuable renonce à l'imposition forfaitaire dans le cadre du PFU) Il existe 2 mécanismes d'abattement pour durée de détention un dispositif général, permettant de bénéficier d'un abattement (de 65 % maximum) pour durée de détention, égal à : 50 % de leur montant lorsque les titres ont été détenus entre au moins 2 ans et moins de 8 ans 65 % lorsque les titres ont été détenus depuis au moins 8 ans à la date de cession un dispositif d'abattement renforcé, applicable aux cessions de titres de PME remplissant certaines conditions. Le taux de l'abattement pour durée de détention est alors porté à : 50 % entre 1 an et moins de 4 ans de détention 65 % entre 4 ans et moins de 8 ans de détention 85 % d’abattement à compter de 8 ans de détention 5. Modalités d'imposition Impôt sur le revenu Pour les cessions réalisées depuis 2018, le principe est l'imposition forfaitaire (12,8 %) dans le cadre du PFU sauf option pour le barème progressif de l'IR. Si elle est formulée, cette option s'applique obligatoirement à tous les gains de cessions du contribuable, mais également à ses revenus mobiliers (l'option est dite globale). Toutefois, les plus-values placées de plein droit en report d'imposition en cas de réinvestissement dans une société contrôlée par l'apporteur sont imposables : pour celles réalisées en 2012, non pas au barème progressif de l'IR mais au taux forfaitaire de 24 % ou 19 % (régime des pigeons) pour celles réalisées de 2013 à 2017, selon le taux moyen d'imposition applicable au contribuable l'année de réalisation de la plus-value en report (et non l'année de l'expiration du report) Prélèvements sociaux Les plus-values mobilières supportent également les prélèvements sociaux au taux global de 17,2 %. Lorsque les gains ont été imposés au barème progressif de l'IR, une fraction de la CSG acquittée sur ces gains (6,8 points depuis 2018) est déductible des revenus imposables.